Pinocchio, de Carlo Collodi

Voyages Littéraires
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Pinocchio, de Carlo Collodi
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Bande-annonce

Au cœur de la Toscane, dans les coulisses d’un petit théâtre capitonné de velours et au beau milieu de la troupe de la Commedia dell’arte, apparaît un jour un petit personnage qui hantera bientôt la conscience de tous les enfants du monde… 


Citations


D’où vient l’histoire de Pinocchio ?

L’histoire originale de Pinocchio date de 1881 et elle a été écrite par un journaliste florentin qui disait ne pas aimer les enfants ! 

Le créateur de Pinocchio ne s’appelle pas Geppetto mais Carlo. Carlo Collodi. Pour être plus précis, son nom de naissance est Carlo Lorenzini. Il est né à Florence en 1826, ses parents sont au service de l’une des plus riches familles de la ville, son père est cuisinier, sa mère est femme de chambre. Dès l’âge de 3 ans, il est confié à son oncle qui habite dans un village non loin de là, au pied des Apennins : Collodi. C’est en souvenir de ce village qu’il choisit le pseudonyme qu’on lui connaît.

Adulte, Carlo Collodi quitte rarement sa Toscane natale. Il est passionné de théâtre, et… il a un petit défaut : il est joueur ! Il joue, et il s’endette. 
C’est pour rembourser ses dettes de jeux qu’un ami éditeur lui propose d’écrire des feuilletons pour son magazine destiné aux enfants : Il giornale dei bambini. Carlo Collodi a presque 50 ans lorsque, un peu à contre cœur, il invente son personnage. 

Nous ne savons pas vraiment d’où vient l’idée de créer ce personnage de Pinocchio (un nom qui signifie « pignon » en dialecte toscan). En revanche, concernant la fée bleue, il semblerait qu’elle soit directement inspirée par une grande amie de l’auteur : Georges Sand.  

Dans son livre sorti en 2003, et intitulé : Le secret de Pinocchio, Jean Perrot mène l’enquête. L’admiration que voue Collodi à George Sand, féministe passionnée et engagée pour la cause italienne n’est pas indifférente à l’invention de ce personnage de la fée dans lequel s’incarnent toutes les figures de la femme. 


Portraits à faire peur, extraits du livre de Collodi 

PORTRAIT DU DIRECTEUR DE THÉÂTRE  :
« C’était un gros homme si laid qu’on avait peur en le voyant.
Il avait une vilaine barbe, noire comme de l’encre et si longue qu’elle touchait à terre et qu’il la foulait aux pieds en marchant.
Sa bouche était large comme un four. Ses yeux paraissaient deux lanternes rouges avec de la lumière dedans. Il tenait à la main un énorme fouet fait de peaux de serpents et de queues de loups entortillées ensemble. »

PORTRAIT D’UN PÊCHEUR  :
« Au même moment, il vit sortir de la grotte un pêcheur si laid qu’il ressemblait à un monstre marin.
Au lieu de cheveux, il avait sur la tête comme un gazon touffu d’herbes vertes. La peau de son corps était verte, ses yeux étaient verts, sa barbe était verte et très longue. Elle lui descendait jusqu’au bas des jambes. On aurait dit un gros lézard se tenant tout droit sur ses pattes de derrière. »


Iconographie

Dessin de Ugo Fleres, 1881
Ugo Fleres, 1881, revue Il giornale dei bambini, Biagi, Florence. 
Dessin de Carlo Chiostri, 1901
Carlo Chiostri, 1901, éditions Bemporad, Florence. 
Dessin de Enrico Mazzanti, 1883, éditions Paggi
Enrico Mazzanti, 1883, éditions Paggi, Florence. 
Dessin de Attilio Mussinno, 1911
Attilio Mussinno, 1911, éditions Bemporad, Florence. 

Adaptations et inteprétations 

Carmelo Bene, 1980

Pourquoi Pinocchio ne parvient-il pas à grandir comme le voudraient Geppetto ou la fée ? Pourquoi, lorsqu’il prend des résolutions, ne parvient-il pas à s’y tenir ? Est-ce une incapacité ? Un refus ? Une impossibilité ?
Tel le thème développé par Carmelo Bene en 1980 dans son adaptation de Pinocchio au théâtre. Pas besoin de se perdre dans les péripéties ou la diversité des personnages. Carmelo Bene invite le spectateur à se concentrer sur sa voix, ou plutôt ses voix car il incarne tous les personnages au seul son de ses voix. Son Pinocchio reste de bois jusqu’à la fin. Il refuse d’écouter les recommandations des adultes. Les adultes ne cherchent qu’à figer les enfants, à réprimer leur vie débordante pour finalement les initier à la mort. La mort, la vie, on est bien au cœur de la problématique de Collodi.

Steven Spielberg, 2001

C’est là précisément le point de vue de Steven Spielberg pour son film intitulé Intelligence Artificielle, et sorti en 2001. Vous vous souvenez ? Dans la société du futur, le petit David est un enfant-robot confié à un couple pour combler son besoin affectif. Lorsque le couple n’en a plus besoin, David est naturellement abandonné dans une forêt où les androïdes sont d’ordinaire jetés à la casse. Mais un robot ne meurt pas. La quête de David va au-delà de son désir de devenir un enfant. Sa quête ultime, c’est retrouver la mère, et plus fondamentalement, retrouver l’amour.
Pour David, aimer est le fruit d’une programmation. Et c’est là que l’on s’interroge.  L’amour peut-il être l’effet d’un programme ? d’un apprentissage ? Où est la frontière entre la réalité et l’artifice ? Le corps de David ressemble à s’y méprendre à celui d’un enfant. Le corps de Pinocchio, parce qu’il est en bois, n’est donc pas forcément ce qui l’empêche d’être un véritable petit garçon. Le corps n’est qu’une enveloppe, dirait Samuel Becket… Qu’est-ce qui fera donc de lui un humain à part entière ?

La compagnie Arketal, 2005

En 2005, Jean Cagnard écrit pour la compagnie Arketal un spectacle de marionnettes intitulé : Bout de bois, d’après l’infatigable, l’inoxydable Pinocchio.
Pinocchio étant un pantin de bois sculpté en 1880, au moment de la création de la pièce, Pinocchio a donc 125 ans. Le temps pour la fée de se transformer en télévision ! Voici une petite présentation humoristique signée Jean Cagnard :

« Vieil immortel acariâtre et déglingué, planté devant sa télé, n’a pas tenu les promesses envisagées en ses pétillants débuts. L’a mal vieilli l’gars, pas beau le rebelle ! Heureusement fée toujours là et apparaître, mais fée excédée, te l’envoie se construire une nouvelle jeunesse, un peu de décence : coup de baguette, pfuiit, voilà notre héros redevenu le bout de bois originel. »

Figures marionnettes imaginées par Marin Jarrie et animées par Sylvie Osman.


Pinocchio au cinéma

1940 : Pinocchio de Hamilton Kuske et Ben Sharpsteen, produit par Walt Disney
1972 : Les aventures de Pinocchio de Luigi Comencini 
1996 : La légende de Pinocchio de Martin Landau 
2001 : I.A. (Intelligence artificielle) de Steven Spielberg 
2002 : Pinocchio de Roberto Benigni 
2020 : Pinocchio de Marco Garrone 

Impressions de lecture

Un mensonge aux jambes courtes, qu’est-ce que cela peut bien être ? Pour ce qui est du mensonge au nez long, Pinocchio est peut-être à même de nous aider à comprendre. Dans le livre de Collodi, le nez de Pinocchio s’allonge à 2 reprises : la première fois, il n’a pas encore de bouche : Geppetto est en train de sculpter son nez qui au fur et à mesure s’allonge, s’allonge… De quel mensonge s’agit-il ici ? Peut-être simplement qu’il y a confusion entre le vrai et le faux, l’animé et l’inanimé ? Tiens, le mot « animé » est composé du mot « âme »… Les yeux du bout de bois qui observent Geppetto sont-ils vivants ? Ont-ils une âme ? Où se trouve la vérité ?
Un mensonge au nez long, c’est peut-être celui dans lequel on est voué à s’empêtrer… Et Pinocchio ne cesse de s’empêtrer au fil de ses mésaventures : toute son histoire retrace en quelque sorte son parcours d’une impasse à l’autre. La faim, la convoitise, la paresse… L’impasse par excellence étant évidemment la mort.

On n’est pas loin de la question de départ qui consiste à se demander où est le vivant et où est l’âme ? Ce qui diffère de la première fois où le nez s’allonge, c’est la conscience, incarnée par le Grillon-parlant.


Podcast en italien (version courte)

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Musiques qui accompagnent notre podcast

Pinocchio de Fiorenzo Carpi, bande originale de la série télévisée de Luigi Comencini (1972) 
La vita è bella de Nicola Piovani, extrait de la bande originale du film de Roberto Benigni La vita è bella (1997) 
Il tema della fata de Nicola Piovani, extrait de la bande originale du film de Roberto Benigni Pinocchio (2002) 
For always de John Willians, extrait de la bande originale du film de Steven Spielberg I.A. Intelligence artificielle (2001) 
Human de Rag’n’Bone Man 

Le générique est extrait de L’instant magique d’Alex Pardossi