Bande-annonce
Un hameau abandonné, tout un monde de pierres ensevelies par la végétation, un hameau perdu dans la forêt, avec des loups, des blaireaux, des guêpes, des crapauds, un chien errant aux pattes cassées…
Citations
Qui est Antonio Moresco ?
Antonio Moresco naît en 1947 à Mantoue. D’un milieu modeste, c’est en écorché vif qu’il milite pour l’activisme politique. Il est portier, veilleur de nuit, ouvrier et même éboueur. À 30 ans il commence à écrire, et 15 ans plus tard le premier éditeur accepte de publier son premier texte, en 1993.
Il écrit du théâtre, des essais, des romans. Il écrit La petite lumière en 2013. C’est le premier ouvrage traduit en français l’année suivante. Il est reçu avec enthousiasme. En 2015 il fait l’objet d’un colloque international à la Sorbonne.
Une « fable métaphysique »*
Antonio Moresco parvient à nous faire admettre que dialoguer avec des hirondelles est moins étonnant que sentir monter leur agitation malgré elles, lorsqu’elles s’apprêtent à partir pour la migration annuelle !
Autrement dit, les plus grands mystères résident dans les choses les plus connues, les plus habituelles, les plus « naturelles » en somme… La migration est un grand mystère, tout comme celui de lumière qui clignote dans l’abdomen des lucioles… La photosynthèse est aussi un grand mystère… La chimie qui donne la vie, l’impulsion électrique qui donne la pensée…
À contrario, tout ce qui dans ce roman pourrait entrer dans le registre du mystérieux ou du merveilleux est traité comme parfaitement banal : face à ce qui est manifestement surnaturel ou étonnant, le narrateur ne s’attarde pas.
*L’expression est de Nathalie Crom (Télérama, octobre 2014)
L’univers de ce livre vous fait penser à quoi ?…
Pour Marie, l’univers de ce livre fait penser à un monde post-apocalyptique, qui en même temps serait resté bloqué dans les doux espoirs de progrès d’après-guerre. Vous avez peut-être reconnu parmi les musiques de notre podcast les chansons rétro du jeu Fallout…
Pour moi, Béatrice, l’univers de ce livre fait penser à la série de David Lynch et Mark Frost Twin Peaks qui se situe au cœur des années 80, dans un petit village vieillot, en proie au surnaturel. Perdu dans les forêts à la frontière entre l’Amérique et le Canada, en apparence tranquille, voire ennuyeux, on découvre à Twin Peaks que personne n’est celui qu’on croit… L’enquête d’un meurtre est menée par un agent du FBI qui se fie aux indices que lui donnent ses rêves… Vous avez aussi reconnu quelques extraits de la bande originale dans notre podcast.
Il y a aussi la série Stranger things, sortie en 2020 et réalisée par Matt et Ross Duffer. L’action se situe en 1983 dans un petit village de l’Indiana. Au cœur d’une forêt, une grotte où disparaissent des adolescents.
Et vous, La petite lumière vous fait penser à quoi ?
Pensées d’un narrateur contemplatif
L’observation minutieuse des choses les plus banales, les plus évidentes, ouvre des réflexions des plus étonnantes, des plus essentielles. Voici par exemple comment il envisage la machinerie infiniment complexe de la marche… On dirait du Giacometti version littéraire !
Je marche, je marche, de ce mouvement d’os et de muscles qui continue de se produire dans le noir. Et de nerfs et de tendons et de tissus conjonctifs et de vertèbres et de matière cérébrale qui envoie des impulsions pour activer ce mouvement qui me paraît, à moi, involontaire, comme s’il venait d’autre part. Comme s’il fonctionnait tout seul, sans qu’il ait besoin de recevoir d’impulsion, (alors que le cerveau se trouve ailleurs, inaccessible, seul, infiniment loi), et se limitait à enregistrer d’autres impulsions qu’il y a eu, qui sait pourquoi, qui sait quand, sur un tracé de mémoire séparée, désormais dépassée ou bien pas encore activée.
La petite lumière, page 88
Le parti-pris des choses
Voici un extrait d’ouvrage cher à mon cœur qui fait écho au regard particulier qu’Antonio Moresco prête à son narrateur.
Francis Ponge, Le parti-pris des choses, 1942
À propos de la pluie tombant sur les arbres :
La pluie ne forme pas les seuls traits d’union entre le sol et les cieux (…)
À y regarder de plus près, l’on se trouve alors à l’une des mille portes d’un immense laboratoire, hérissé d’appareils hydrauliques multiformes, tous beaucoup plus compliqués que les simples colonnes de la pluie et doués d’une originale perfection : tous à la fois cornues, filtres, siphons, alambics
Ce sont ces appareils que la pluie rencontre justement d’abord, avant d’atteindre le sol. Ils la reçoivent dans une quantité de petits bols, disposés en foule à tous les niveaux d’une plus ou moins grande profondeur, et qui se déversent les uns dans les autres jusqu’à ceux du degré le plus bas, par qui la terre enfin est directement ramoitie.
Ainsi ralentissent-ils l’ondée à leur façon, et en gardent-ils longtemps l’humeur et le bénéfice au sol après la disparition du météore. A eux seuls appartient le pouvoir de faire briller au soleil les formes de la pluie, autrement dit d’exposer sous le point de vue de la joie les raisons aussi religieusement admises, qu’elles furent par la tristesse précipitamment formulées. Curieuse occupation, énigmatiques caractères.
Ils grandissent en stature à mesure que la pluie tombe; mais avec plus de régularité, plus de discrétion; et, par une sorte de force acquise, même alors qu’elle ne tombe plus. Enfin, l’on retrouve encore de l’eau dans certaines ampoules qu’ils forment et qu’ils portent avec une rougissante affectation, que l’on appelle leurs fruits.
Telle est, semble-t-il, la fonction physique de cette espèce de tapisserie à trois dimensions à laquelle on a donné le nom de végétation (…)
Musiques
The night we met de Lord Huron
Divenire de Ludovico Enaudi
Adagio de la Symphonie n°5 de Gustav Mahler
Le vol du bourdon de Nicolaï Rimsky-Korsakov, interprété à la flûte traversière par Fanny
I don’t want to set the world on fire de Jackie Wilson, teaser du jeu vidéo Fallout, 1997
Extraits de la bande originale d’Angelo Badalamenti pour la série TV Twin Peaks de David Lynch et David Frost
No surprise de Radiohead
Le générique est extrait du titre L’instant magique d’Alex Pardossi
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