Scritto di notte d’Ettore Sottsass

Voyages Littéraires
Voyages Littéraires
Scritto di notte d’Ettore Sottsass
Loading
/


Bande-annonce

Lorsqu’Ettore Sottsass crée une maison, un meuble ou un objet, il réinvente en même temps notre façon d’habiter le monde. En témoignent les belles expositions qui lui sont consacrées dans le monde… Mais qui s’est jamais penché sur son écriture ? Je vous propose de découvrir une autre façon d’entrer dans SON monde : la littérature.


Citations


Qui est Ettore Sottsass ?

Ettore Sottsass est né en Autriche en 1917. C’est au milieu des montagnes qu’il garde ses meilleurs souvenirs d’enfance. Il n’a pas encore dix ans lorsque sa famille s’installe à Turin en Italie. Il passe son diplôme d’architecture en 1939 mais sera appelé aux armes au Monténégro pendant la guerre.
De retour en Italie, il travaille d’abord avec son père architecte puis s’installe à Milan où il trace sa voie en ouvrant son propre studio de design.

Pour connaître son parcours d’artiste, voici une « visite guidée » de l’exposition qui lui est consacrée au Centre Pompidou du 13 octobre 2021 au 4 janvier 2022 :


Autoportrait humoristique

Souvent, les jeunes-filles de bonne famille aiment les chiens perdus. Plus particulièrement les chiens placides comme je l’étais, moi, un chien placide, un chien perdu et calme, de ceux qui ne comprennent rien aux choses du monde, et le peu qu’ils comprennent les scandalise. Ils voudraient n’avoir rien à faire avec le monde tel qu’il est, ils en imaginent un autre. Ils sont seulement un peu sales parce qu’ils ne se lavent pas beaucoup, ils sont décoiffés, ils portent toujours les mêmes vêtements, été comme hiver, et même les chaussures ils ne les portent pas neuves et brillantes, mais vieilles et usées, tout usées, en particulier les semelles.

Scritto di notte, pages 188-189

Le style de Sottsass

Avez-vous remarqué l’utilisation de longues listes de mots dans l’écriture de Sottsass ? Elles font surgir en nous des images, des sensations, des interférences, et nous permettent d’approcher sa pensée par petites touches, sans avoir besoin de phrases descriptives ou argumentatives…
Le jeune Ettore admet -non sans humour- qu’il se sent très « présocratique ». Son goût pour les fragments n’est pas sans relation avec sa façon de collectionner des images et jouer sur les combinaisons pour créer des effets souvent insolites.

Dans cet article, j’essaie de comprendre comment, dans sa démarche artistique, le disparate bigarré s’organise en un ensemble où « tout se tient ».
https://www.centrepompidou.fr/fr/magazine/article/dans-le-cerveau-dettore-sottsass


Humour

Ettore Sottsass actionne en nous la mécanique du rire : il donne l’impression d’être balloté dans des circonstances qui lui sont totalement étranges et étrangères.

Extrait :

Je me trouvais dans la vie comme une espèce de paquet de la poste, qui ne sait jamais où il est en train d’aller ni pourquoi ; il se retrouve là où on l’envoie sans même entendre les ordres (…) Et puis dans une guerre il y a des réseaux très complexes d’ordres, et beaucoup -énormément- de gens qui transmettent les ordres ; et énormément d’autres gens ! Et l’on ne voit jamais personne, on ne connaît le nom de personne, et pire encore, on ne sait pas ce que ces ordres signifient. On reste là ou on bouge dans un énorme minestrone d’ordres, sans sel, sans saveur, sans couleur ; seulement des feuilles de papier qui flottent dans le bouillon incolore des voix hurlantes qui sortent du plastique noir des téléphones ou autres.

Scritto di notte, page 118

Sottsass et la musique

Les références à la musique sont permanentes dans les carnets de notes d’Ettore Sottsass. Des titres notés ici et là, pêle-mêle ou groupés par familles musicales.
Un répertoire éclectique ! J’ai choisi de transcrire ici quelques-unes de ses notes et me suis amusée à compiler une sorte de playlist :

Dans un cahier daté de 1986 :
Tom Waits, Swordfishtrombone – The heart of Saturday nights – Johnny Thunders, hurt me – The style council, Café bleu – Bande originale du film Furyo par Ryuichi Sakamoto (1983)

Dans un cahier daté de 2001 :
Nina Simone, “cantante nera speciale” (= « chanteuse noire spéciale »)

Dans un cahier daté de 2005 :
Bach, Amadou, Glen Gould, Siciliano, Bach-Gould, Franklin , Gilberto, Dylan, Buena vista, Presley, Fabrizio De André, Bregovic, Shields, Leonard Cohen, Life gate, Lou Reed, Ludovico Enaudi : melodia Africana, Renzo Arbore, Rolling stones, Sade, Salif Keita** (Madan), Texas Tornado, Zanzibar, Arancia meccanica, Mood for love, Gregovic, Rameau, Havana Caffe, Million $ hotel, Roberto Murolo e Renzo Arbore (chansons napolitaines) *** De gregori, Philip Glass *** Metamorphosis, Vecchioni, Callas ***, Beethoven.

N’oublions pas que sa célèbre collection de meubles Memphis doit son nom au titre de Bob Dylan : Stuck inside of Mobile with the Memphis Blues again


Jeu basé sur l’imaginaire d’Ettore Sottsass

Et si les machines faisaient un jour le bonheur de l’homme ?… 
Ettore Sottsass imagine le futur… Il développe en 1972 une utopie radicale, un monde qu’il baptise « Il pianeta come festival », « La planète comme festival ».
Construit à partir des textes et dessins d’Ettore Sottsass publiés dans la revue Casabella, Elisa Larrière et Aurélien Stab ont donné vie à ce rêve éveillé : 

Aujourd’hui, j’essaie de confronter l’univers de Sottsass à la réalité qu’est devenue le jeu vidéo, comme si ces deux idées, nées à la même époque, se rencontraient pour donner à VOIR l’utopie imaginée par Sottsass.

Elisa Larrière

Découvrir l’univers créé par Elisa Larrière


Musiques qui accompagnent notre podcast

Stuck Inside of Mobile with the Memphis Blues Again de Bob Dylan (notre bande-annonce)
Metamorphosis 1 et 3 de Philip Glass
Na tazzulella è caffé de Renzo Arbore et Roberto Murolo
Madan de Salif Keita
Dance me to the end of love de Léonard Cohen
Hurt me de Johnny Thunders
Prélude et fugue n°2 de Jean-Sébastien Bach, extrait du Clavier bien tempéré
Sinnerman de Nina Simone
Generale de Francesco De Gregori

Le générique est extrait du titre L’instant magique d’Alex Pardossi
Youtube


Traductions des extraits par Béatrice Pardossi-Sarno